Allez lire les journaux précédents  ►►►

BALUM PITI el Guanche - Lundi 29 juillet 2013 à Gran Canaria

 depuis la marina de Las Palmas à Gran Canaria - ponton G40

Cliquez pour agrandir les photos.

Cliquez pour agrandir les cartes.

Lundi 29 juillet 2013 - Journal de Raphaël

 

Dimanche 14 juillet 2013 : on a choisi notre prochaine destination, ce sera l’île de la Gomera dans l’archipel des Canaries. Dernières balades dans la ville de Funchal, derniers préparatifs pour le bateau.

 

Lundi 15 juillet 2013 : on est partis à 9h15 ce matin. Bon vent, jolie moyenne pour le moment, 5,25 nœuds, et puis à 17h30, l’événement. Didier veille, moi je suis dedans, et soudain ! « Une tutu, une totor ! » Je bondis hors du bateau, et effectivement une jolie tortue brune passe à proximité. Bonheur.

Vigie-baleine ne donne rien, hélas ; par contre les puffins et les pétrels sont bien là, et en nombre.

Depuis hier matin, nous n’avons vu qu’un cargo, mais c’était une curiosité quand même : c’était ce fameux navire qui avait l’objet d’un reportage dans Thalassa, et qui transporte des yachts d’Amérique jusqu’en Méditerranée.

 

Mardi 16 juillet 2013 : deuxième nuit en mer, mon quart s’achève à 6 heures du matin, il fait encore nuit, j’aperçois à peine des lueurs dans le lointain, je vais dormir, Didier prend la relève.

3 heures plus tard je me réveille, et je vois l’île de Tenerife émerger de la brume. Petit à petit, l’immense volcan Teide, 3700 mètres, se dessine au dessus de l’île. Au passage du cap, on subit une petite accélération du vent sans conséquence. L’île de la Gomera sort doucement du brouillard, alors que le vent forcit à plus de 20 nœuds. Nous traversons sans trop nous inquiéter ce détroit entre les 2 îles, mais l’arrivée sera un peu plus rock’n’roll. Tout à coup le vent passe bien au dessus de 30 nœuds, impossible de contrôler le bateau qui se fait plaquer par les rafales. Dans ces conditions Didier enlève toute la toile, c’est épuisant, et nous arrivons enfin au port de San Sebastian de la Gomera, soulagés. Nous apprendrons plus tard, par des amis de rencontre, Chris et Nicole, que bon nombre de voiliers ont démâté à cet endroit, le vent pouvant atteindre des vitesses supérieures à 50 nœuds en rafales.

 

Jeudi 18 juillet 2013 : après une nuit où nous n’avons pas eu de mal à nous endormir, de mauvaises nouvelles nous parviennent par mail qui vont beaucoup affecter Didier, et pour cause.

Aujourd’hui je le laisse tranquille, je vais me promener jusqu’au phare qui domine ce fameux passage, et là je comprends. Un vent puissant transforme la mer sur quelques centaines de mètres en machine à laver. Je verrai plus tard un voilier s’y engager, et faire demi-tour. La raison de ce vent local est due au rapprochement des îles qui crée des couloirs où le vent s’engouffre. Ils sont même signalés sur des cartes spécialisées, et les navigateurs ont tout intérêt à en tenir compte. Notre port qui est en principe abrité par de hautes falaises subit depuis 2 jours des rafales dont une, que j’ai observée, était de 31 nœuds. Ça gâche un peu le plaisir, mais surtout on doit attendre pour reprendre notre route. Heureusement le village est beau, vivant et coloré.

 

Vendredi 19 juillet 2013 : aujourd’hui on part découvrir l’île en car. Elle est assez haute, son centre est occupé par une forêt primaire très belle, dont une bonne partie est hélas partie en fumée l’automne dernier. Les paysages rencontrés sont hors du commun, ils font penser au Canyon du Colorado, ou aux hauts plateaux de Bolivie. Les plus hauts sommets, nous les passons dans le brouillard, avec même de la pluie, pour enfin redescendre sur un petit village côtier très mignon, Valle Grand Rey, avec vue sur l’île d’El Hierro d’un côté, et l’île de La Palma de l’autre. Au retour, après un bon repas au bord de l’eau, nous aurons la chance de voir l’île de Tenerife débarrassée de sa brume, et le volcan Teide dans toute sa splendeur.

 

Dimanche 21 juillet 2013 : nous quittons La Gomera peu après 9 heures. Nous sommes allés observer la mer, pour voir si l’accélération du vent à la sortie n’était pas trop méchante. Nicole et Chris sont sur le pont de leur joli bateau pour nous saluer. Avec un demi-génois et 31 nœuds de vent, nous passerons sans souci, et finalement nous atteindrons une zone protégée par l’île de Tenerife, avec même parfois 0 nœud de vent. Mais tout va bien, on arrive finalement au sud de l’île de Tenerife, dans un nouveau port, San Miguel, qui a surgi ces dernières années avec ses immeubles tout neufs, ses hôtels de luxe et ses golfs.

 

Lundi 22 juillet 2013 : ce soir on part pour l’île de Gran Canaria, avec navigation de nuit, pour, en principe, arriver vers 8 heures du matin.

 

Mardi 23 juillet 2013 : notre navigation ne s’est pas du tout passée comme prévu. Le vent est 2 fois plus fort qu’annoncé, jusqu’à 26 nœuds, les vagues aussi, et tout ça dans le nez. Résultat, on marche au moteur, il est midi et on n’est pas près d’arriver.

Et pourtant, quelle récompense : un marlin d’environ 2 mètres nous suit pendant 10 minutes. Au début, Didier croyait que c’était un sac poubelle, et moi une flaque d’huile… Mais non ! On le perd, car il faut refaire le plein de fuel en plein mer. Ça vaut bien une baleine ! Mais quelques instants plus tard, 3 grands dauphins passent sous le bateau, et alors qu’on les suit, une baleine souffle et apparaît à 200 mètres de nous. C’est une journée faste qui vient compenser une dure nuit. Là je vois le port de Las Palmas qui sera notre prochaine étape.

Après quelques recherches sur Internet, notre marlin serait le « marlin bleu des Canaries », et les grands dauphins seraient des « dauphins clymène ».

 

Vendredi 26 juillet 2013 : aujourd’hui nous louons une voiture pour 3 jours, afin de découvrir l’île de Gran Canaria, son intérieur volcanique, ses côtes touristiques, sa civilisation ancienne avec ce peuple du néolithique, les « Guanches », et peut-être sa gastronomie.

Nous partons sur la côte nord, que nous avons longée en arrivant en bateau. Nous arrivons dans le bourg multicolore de Galdar, collé à un petit volcan. Là se trouve un musée très intéressant nous racontant la vie des premiers habitants de l’île, les Guanches. C’est en fait un grand chantier de fouille, couvert, agrémenté de quelques vitrines de trouvailles, de stations vidéo en français, d’une grotte décorée de peintures et de maisons restaurées. Le tout est magnifiquement présenté, très simple et pédagogique, avec en plus un personnel très accueillant. A ne pas manquer.

Comme il est déjà 14 heures quand nous sortons, on se trouve un petit resto au bord de l’eau dans le petit port de Sardina, où l’on mange une paella qui présente la particularité d’inclure des berniques (des « chapeaux chinois ») dans la recette.

De là, nous suivons la côte sur une dizaine de kilomètres avec vue sur le volcan de Tenerife, le Teide, le long de falaises abruptes, et en croisant une oasis par-ci par-là. Comme il se fait tard, nous retraversons l’île par le centre. On trouve une route hallucinante et lunaire que peu de gens doivent emprunter. Et pourtant… C’est simple, on s’arrête tous les 100 mètres pour faire des photos.

 

Samedi 27 juillet 2013 : 2ème jour en voiture. Une autoroute rejoint directement le sud, Maspalomas, Puerto Rico, Puerto Mogan. Ce dernier port avait été le point de chute de Didier lors de son premier voyage, et il en gardait un excellent souvenir. L’endroit est très joli, architecture simple à un étage, des fleurs partout, beaucoup de couleurs, un Port Grimaud espagnol. On y mange dans un resto au bout de la digue, on regarde les bateaux dont un sous-marin de vision sous-marine qui plonge devant nous.

Le reste de cette côte, c’est tout ce qu’on n’aime pas, des cages à lapins qui défigurent le paysage, des sites abimés par des constructions grotesques. Au milieu de tout ça, on trouve quand même une plage pour se baigner, au dessus de laquelle un site guanche a été fouillé et mis en valeur.

C’est d’ailleurs l’objet de notre prochaine visite. Un « parc à thème » a été reconstitué plus vrai que nature dans les collines. L’habitat et la vie des Guanches y sont expliqués comme si on y était.

Retour au bateau par les routes de montagne, avec des paysages volcaniques que nous adorons. Au passage, nous verrons une caldeira parfaite, un cratère dont le fond est plat et cultivé, et retour plongeant sur Las Palmas.

 

Dimanche 28 juillet 2013 : c’est notre dernier jour de location, et on a envie de compléter notre connaissance de ce peuple pré-hispanique. Pour cela nous retournons sur la côte nord en direction de Galdar. Nous trouvons le site de Maipes (« mauvais pays »), une nécropole de plus de 700 tombes, implantée sur une coulée de lave qui s’est produite il y a à peu près 3000 ans. Une fois de plus, l’endroit est très bien mis en valeur, et les explications ne manquent pas. Un petit resto typique dans l’arrière pays pour nous redonner des forces, et nous voilà repartis pour un autre site dont nous avons entendu parler : el Cenobio de Valeron. Celui-ci se trouve dans une falaise verticale autant qu’inaccessible. Heureusement des aménagements nous facilitent la visite qui sera étonnante. Il s’agit d’une gueule béante de volcan dont une couche à l’intérieur est assez friable. Les Guanches ont creusé cette roche de dizaines de cavités plus ou moins grandes pour placer leurs réserves de grains ; on y stockait ce qu’on voulait, on scellait l’entrée avec une pierre plate et du mortier, et la marchandise était à l’abri des bêtes et pillards, ce qui, éventuellement, garantissait la survie de ces gens.

Toutes ces visites nous ont fait revivre cette époque de façon précise et passionnante.

 

Le bateau, c’est aussi ça, des excursions terrestres, de la culture, de la gastronomie.

 

Les plantes et les fleurs des Canaries : les tropiques, le désert, le plaisir des yeux.

Cliquez pour agrandir les photos.

Vendredi 26 juillet 2013 - Le mot de Didier

 

Les nuits en mer

On n’en parle pas beaucoup, mais ce sont des moments importants, parfois fatigants, parfois superbes, quand la lune est là, quand le plancton fluorescent illumine le sillage de Balum piti. On a trouvé un bon rythme : des quarts de 3 heures, Raph de 21h à minuit, moi de minuit à 3h, Raph de 3h à 6 , et moi de 6h à 9h ; là on fait un petit déj’ ensemble, et la journée redémarre à 2, avec des siestes pour récupérer, parce que ça ne fait quand même pas des nuits complètes… La nuit on guette, on cherche les cargos ou les bateaux de pêche, on lit, dehors, dedans, on grignote, et ça passe vite 3 heures ! Parfois de grosses émotions, un bateau qui voudrait passer trop près, non, tout compte fait il passe loin… La nuit on perd un peu la notion du temps, on est loin du monde.

 

 

Manger dans le bateau en mer avant-après

Quand on est partis, les premiers temps les repas en mer étaient parfois compliqués, quand ça bougeait un peu trop fort, quand les assiettes avaient tendance à viser le plancher, quand on ne se sentait pas de faire la cuisine… Maintenant, quel que soit le temps, on s’installe à table, et on mange ! Le cuistot du bord essayait de faire des plats d’avance avant les départs pour de grandes étapes, maintenant il se cale bien, fait rissoler les saucisses et mijote les pommes de terres sautées, même dans la brafougne et la valdingue !

 

 

Les conserves au Portugal, en Espagne – des fayots, des fayots…

Ah c’est dur, pour des petits français, de faire ses courses quand on s’éloigne des épiceries françaises… Pour les produits frais, ça va, mais quand on cherche des conserves, des produits qui se gardent, alors ça se gâte. En France on trouve plein de bons produits en conserve, des petits légumes, des haricots verts, des petits pois, des épinards, des asperges, des fonds d’artichauts, et puis des plats tout prêts, des coqs au vin, des spécialités régionales en tous genres… Dès qu’on passe la frontière, c’est fini tout ça ! Au rayon conserves, il y a des fayots, des haricots rouges, des fèves, des pois chiches, et parfois il y en a même plusieurs sortes de chaque ! Et puis c’est tout. Désespoir ! Heureusement qu’il y a à bord un cuisinier inventif !

 

 

Manœuvres de port

Les terriens pensent que c’est compliqué de mener un bateau quand on est au large. Eh non, au large, on a le temps, on peut préparer ses manœuvres longtemps à l’avance. Là où c’est compliqué c’est dans les ports, eh oui, car là on est toujours dans l’urgence, ça va toujours trop vite, le quai a tendance à vouloir nous agresser, le vent nous pousse dans le mauvais sens… J’avoue que pour moi ce sont toujours des moments de stress. Mais disons-le, on n’a jamais raté une manœuvre de port, et on en est très fiers ! Pas de cris, pas d’excitation, pas d’engueulades, même si parfois on serre les fesses ! Je suis à la barre et au moteur, Raphaël est aux amarres et prêt à sauter sur le quai, et à chaque fois on se dit, après coup : « impeccable, cette manœuvre ! »

 

 

Comparer la météo aux Canaries il y a 10 ans et aujourd’hui

Extrait du journal de bord de BALUM il y a 10 ans :

http://baleines.etc.free.fr/

« Au début, on navigue "à la canarienne" : pas de grand-voile, nous n'établissons que le génois. Les côtes des îles dans l'axe de l'alizé subissent des accélérations du vent plus ou moins fortes selon les jours et on a entendu sur Radio-Ponton des histoires de rafales à 50 ou 60 nœuds aussi soudaines qu'imprévisibles... Avec Samos, nous déroulons progressivement tout notre génois, puis timidement nous hissons la grand-voile et finalement nous ferons le reste du trajet toutes voiles dehors. Je garde quand même un œil sur l'aspect des vagues qui nous annoncerait éventuellement LA rafale qui menace ; mais non, rien, soleil et bon vent… »

 

Eh bien en 2013, c’est l’inverse, il y a toujours des accélérations, et yenamarre !

 

 

Les Guanches

Pour tout savoir sur les Guanches, allez lire Wikipedia :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Guanches

Sachez simplement que les Guanches ont colonisé les Canaries depuis 3000 avant JC, sans doute en plusieurs vagues, apparemment des « cromanoïdes », puis des méditerranéens venant d’Afrique du nord. Sur Gran Canaria il y avait 20 000 habitants quand les espagnols sont arrivés, et ils avaient un mode de vie assez évolué, des villages, une société très structurée, des classes sociales très hiérarchisées, et même une justice assez tranchante !

Et c’est fascinant de découvrir les sites archéologiques, car tout ça a l’air assez frais, récent, pas très abimé : un vrai bonheur pour archéologue en herbe !

 

 

17 juillet - Nougat

J’ai appris le décès de mon ami Nougat en arrivant sur l’île de la Gomera, crise cardiaque soudaine. Pas facile de voyager en bateau, quand on apprend une nouvelle pareille. Raph était là, discret et présent. J’ai beaucoup utilisé la messagerie pendant tous ces jours, le réseau des amis était là. Mais pas facile quand même.

 

Des dessins de Peyton - on ne s'en lasse pas !

Novembre 2011 : BALUM piti, un Feeling 32 dériveur intégral, a été livré "tout nu" au chantier Ariès de Cherbourg.
Après une préparation impeccable, BALUM piti a été mis à l'eau en janvier 2012.

 

BALUM veut dire "baleine" en breton, piti veut dire "numéro deux" en tahitien - eh oui, c'est un métis breton-tahitien !

 

 Il y a eu Balum, puis BALUM piti. Qui sera leur successeur ?